Palais des Congrès de Lorient
Véronique MEHL
Maîtresse de conférences en histoire ancienne à l’Université Bretagne Sud
En Grèce ancienne, tout, dans le corps humain, peut devenir signe et faire l’objet d’une interprétation. Divers techniciens lisent ces signes selon des approches différentes, la médecine et la physiognomonie étant les plus connues.
L’art médical se construit comme une science rationnelle autour d’Hippocrate, considéré comme le « père de la médecine ». Le médecin antique (iatros) est détenteur d’une connaissance (epistemê) et d’un savoir-faire (technê) acquis après des années d’études, auprès d’un entourage familial et par la fréquentation d’écoles réputées. Comme Hippocrate, descendant du dieu Asclépios, certains médecins obtiennent une reconnaissance sociale et un statut envié. La profession est interdite aux esclaves, mais pas aux femmes qui apparaissent dès le IVe siècle av.-J.-C.
Si les historiens ont longtemps cru qu’il s’agissait de sages-femmes, elles sont bien des médecins à part entière, soignant au-delà de la seule gynécologie. Professionnels rémunérés par la communauté ou par des particuliers, parfois fortement récompensés par des malades célèbres, les médecins exercent en cabinet ou dans des maisons spécialisées, certains suivent les armées en campagne. Tous doivent répondre à des règles éthiques, contenues dès le Serment hippocratique et sans cesse répétées : ne pas nuire, respecter le secret médical, laisser la chirurgie à des spécialistes, se placer sous l’autorité des divinités, ne pas participer à des compétitions entre praticiens, respecter ses maîtres, ne pas faire de distinction entre les patients, ne pas pratiquer la médecine-spectacle.
Leur apparence est contrôlée : « il sera d’une grande propreté sur sa personne, mise décente, parfums agréables et dont l’odeur n’ait rien de suspect ; car en général, tout cela plait aux malades. » Le médecin connait des concurrents : ses confrères, des herboristes, des prophètes ambulants, des magiciens et des divinités. Répondre à des règles strictes est donc un gage de sérieux dans ce contexte compétitif. Se comporter dignement, déterminer la pathologie en auscultant le malade, proposer une thérapeutique ou une diète, classer les maladies, pratiquer pour certains la chirurgie, expérimenter, enseigner, autant de techniques anciennes qui influencent la médecine occidentale jusqu’au XXIème siècle.